Quatre lettres suffisent....
Samedi matin 7h45 La journée s’annonçait belle. Le soleil. La chaleur. Attentif. On n’est jamais assez attentif, en éveil… Un tout petit mot de trop, à coté, qui ne paye pas de mine et qui fait un ravage, parce qu’il est tombé dans ce coin de l’âme si fragile et que ces quelques lettres sont venues mettre la confusion, le doute, la douleur. Dimanche matin. Même heure. Hier une vague de lumière a succédé au noir de l’encre. Mon coeur a fait le grand écart. Franck
Et puis quelque chose se casse. Un tout petit bruit. Vous savez le bruit que fait un rayon de lune qui se brise. Mon Ange me fait savoir qu’une de mes paroles l’a blessée. Un mot. Un mot de trop. Mal venu. Un mot de quatre lettres trop désinvoltes.
En quelques secondes toutes les portes entrouvertes sur cette belle journée se sont fermées une à une.
Et j’entendais claquer les portes à l’intérieur. Et le noir se faire, comme si la bouteille d’encre s’était renversée. A l’intérieur. Une immense tache d’encre noire, épaisse, lourde. J’ai provoqué une blessure par négligence, par désinvolture, par manque d’attention. Je voulais envoyer un sourire et c’est une claque qui est reçue.
Là, maintenant, il fait sombre. C’est monté comme une vague. Une marée d’un seul d’un seul bloc, d’un poids infini.
D’abord ça prend au ventre, au creux de l’estomac, puis ça envahi toute la poitrine et l’écume sombre se diffuse dans les membres, jusqu’au bout des doigts. Peu à peu je n’entends plus rien et je deviens aveugle. Ma tête n’est remplie que d’une seule phrase : " Tu lui as fait du mal ", et peu importe que tu l’ais voulu ou non, l’important c’est qu’elle attendait un sourire et qu’elle à reçu un coup.
Un mot qui tombe mal, juste sur la tranche, fait un dégât insensé en se brisant. Un bruit sec, que rien ne vient effacer, un bruit planté dans la tête comme un clou.
Et regretter ne sert à rien.
Et être désolée sert à rien.
Quelque chose saigne au loin.
A l’heure où j’écris, il fait déjà chaud, c’est une belle journée. Je le vois et pourtant elle ne m’atteint pas. Je me maudis mais ça ne sert à rien. Mes dragons sont là, tous. Je les connais si bien, ils déferlent en train bleu, bleu nuit, bleu d’amertume. Mon eau s’est troublée, la source hoquette.
Je jette avec rage les mots sur le papier, je voudrais les rentrer un à un dans ma chair, pour saigner plus noir, pour effacer. Quatre lettres suffisent, à détruire un sourire, quatre lettres suffisent à éteindre une étoile…
Quatre lettres, quatre gouttes rouge suspendues à leurs clous aux quatre coins du cœur pour qu’il se souvienne.
Quatre lettres de suie sans couronne d’épines avec dans leurs flancs cette page blanche et ses cicatrices obscènes d’où suintent de froids copeaux de lettre qui crissent sous la plume grimaçante.
Quatre lettres qui se noient dans une flaque de mots morts, oubliés dans une langue croupie.
Mes phrases sont titubantes, parce que quatre lettres suffisent pour éteindre une étoile.
Quatre lettres aux arêtes de verre, brûlantes et tranchantes….
Il est un peu courbatu.
Le soleil est en train de se lever. La même journée qu’hier. Le noir en moins.