Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
J'irai marcher par-delà les nuages
1 novembre 2007

Bleu.....

Alors user la même corde. Lancer toujours plus loin le même filet. Des mots qui font retour, comme s’ils sortaient des circonvolutions d’un coquillage. Toujours le même filet. Toujours aussi vide. Piètre pêcheur. Sinistre pécheur. Des mailles trop grandes, trop lâches. Et un filet toujours vide. Pourtant un filet tissé dans les rêves, avec des mailles de solitude et d’espérance, tissé avec le fil des jours, tressées avec les heures d’attentes, nouées par de longs et solides silences. Un filet brodé pour cueillir les étoiles. Et toujours le remonter aussi vide. Comme si tout le traversait, sans jamais s’arrêter. Rien.

 

Ces filets là ne retiennent pas qui ne veut s’y blottir. Ils ne prennent pas. Ils accueillent. Changer de mer n’y ferait rien. Alors autant continuer à lancer le même filet et tirer la même corde jusqu’à l’épuisement. Jusqu’à l’étoile peut-être. L'étoile bleue.

 

A force, de racler le fond de l’océan je ramène parfois quelques mots égarés. Quelques mots de tristesse. Quelques mots à l’agonie parce qu’ils ont été trop dit, trop écrit. Je les pose sur ma page, je les réconforte un peu, puis ils s’en vont mourir plus loin, dans d’autres mains, dans d’autres voix, sous d’autres yeux. Sous d’autres bleus. Piètre pêcheur, P27_10_07_11perdu dans ses marées, empêtré dans son filet. Bénissant les tempêtes et leurs promesses bleues.

 

En moi, tu es comme un vertige de bruyères battues par les vents du nord. De ces bruyères brûlées par les embruns salés qui me viennent de la mer. Là-bas, au plus loin de ma mémoire.
Tu es ma terre hostile et fraternelle, mon île, mon endroit de misère et de miséricorde, mon lieu de pénitence et d’espérance sacrée. En moi, tu es la nuit, la nuit ouverte sur les rumeurs du monde. Et tu habites en moi au lieu le plus fragile, le plus secret, celui que je ne dis pas, que je n’avoue jamais. Au lieu le plus ténu, sans doute le plus clair et le plus vacillant. Tu es l’immensité et le cheval qui va avec. Tu es un galop ébloui sur la folie des hommes. Tu es une course enflammée sur cette lande ouverte, comme une éventration sur le corps de la terre. Et la glace et l’incendie jaillissent de tes sabots. Oui, je te le dis, tu es ce pur galop qui dévaste mes heures, mes jours. Mes nuits.
Bleues.
Je suis un errant, un nomade, un perdu. Il me fallait ta lande pour habiller la mienne. Il me fallait tes brûlures pour révéler les miennes. Il me fallait ta nuit pour éclairer la mienne. Il me fallait tes mots pour que je puisse, enfin, accrocher mon rêve au bord violine de l’horizon. Je suis un errant, un nomade, un perdu, un sans rive, il me fallait l’espace, tu n’as pas de limite. Il me fallait du temps, et tu es immortelle. Il me fallait un regard tu as celui de l’aigle, il me fallait une voix, tu m’as appris le cri. Je voulais la chaleur et tu vaux mille soleils. Je voulais la lumière et tu te dresses comme un phare.

 

En moi tu es une lande ouverte sur les brumes. Tu es l’espace sauvage, et rude, et fier, et dépeuplé, et arraché. Tu es l’espace sans fin troué par les crépuscules et les hurlements des loups. Tu es la vie quand elle doit se survivre. Et le sang quand il faut qu’il soit bleu.
Tu es l’endroit du mystère et de l’appel, celui de la quête et du renoncement. Tu es une lande ouverte qui porte le désir avec acharnement, comme une plaie qu’on lèche pour être sur d’être encore vivant. Tu dis être en enfer. Alors j’irais là-bas. Je connais le chemin, je te ramènerai. Et ta peau sera blanche. Immaculée. Tes cicatrices je les effacerai, une à une avec le souffle et la salive, du bout des lèvres, chair contre croûtes.

 

 

Et ta lande à ma lande s’ajoute. Et ton ciel à mon ciel se répond et se mêle. C’est ton sang qui coule dans mes veines.
Qui passera du rouge au bleu.

 

Bleu, comme un ciel de printemps. Bleu, océan. Bleu, comme un désir tremblant.

 

Franck.

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
L
il faut etre un genie trés sensible pour arriver à toucher la sensibilité des autres dans un monde ,il faut l'avouer, laide et beau à la fois..ce fut un plaisir de te lire
Répondre
T
Voyageur solitaire!
Répondre
E
J'aime particulièrement :<br /> " un filet tissé dans les rêves, avec des mailles de solitude et d’espérance, tissé avec le fil des jours, tressées avec les heures d’attentes, nouées par de longs et solides silences. Un filet brodé pour cueillir les étoiles." et puis aussi<br /> "Je suis un errant, un nomade, un perdu".<br /> C'est très beau à écrire et à lire tout cela, mais tout ça n'est pas la vie, la vie est bien plus laide que ça. Alors l'écriture, elle sert à cela, oublier la laideur de la vie.
Répondre
F
Il n'y a pas de vraies réponses à tes questions Univoix, à part ce que dit Angeline : "Tout ce qui est écrit est maudit, par essence." Là se tient une grande vérité.<br /> Mais pour écrire il ne faut pas seulement avoir le goût du malheur, ça serait trop simple. Ecrire est plus exigent : tenter d'aimer bien après le malheur.<br /> Quelqu'un que j'aime dit : "La main qui écrit, efface" Là, se tient une autre grande vérité....
Répondre
U
Pourquoi l'acte d'amour est-il encore plus chaud dans le texte couché ? pourquoi cette mise à nu plus émouvante qu'aucun regard ou corps à corps jamais ne saurait transcender ? <br /> Franck pourquoi le Mot est-il plus fort quand il est tû ?<br /> ma bouche ouverte est vaine ...<br /> ... Et tu habites en moi au lieu le plus fragile, le plus secret, celui que je ne dis pas, que je n’avoue jamais...
Répondre
Publicité
J'irai marcher par-delà les nuages
J'irai marcher par-delà les nuages
Derniers commentaires
Archives
Newsletter
Visiteurs
Depuis la création 167 982
Catégories
Pages
Publicité