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J'irai marcher par-delà les nuages
30 novembre 2008

Un chant introuvable.......

Et chaque mot est une porte étroite. Un passage dans un labyrinthe de miroirs étranges. Singuliers. Qui nous renvoie des images déformées. Et l'effrayante face qui rebondit dans une cascade d'images aplaties par les saisons révolues, l'usure. L’usure.

 

Et chaque mot est une scarification, une chair de terre sur un temps de pierre. Sillon d'une parole qui creuse un sol raviné et sec. Et chaque mots dissèque un peu plus l'autre coté de la peau, l'envers des gestes, cette part de retrait, l'incertain de la course, son enroulement autour du coquillage de la mémoire. Chaque mot est une porte étroite, un passage, un crépuscule, un glissement. C'est un endroit de chute, le lieu d'une avalanche. Un excès de néant ou de nuit. De nuit, surtout de nuit. Le kyste d'un désir impossible.

 

 

Car la parole raconte une autre histoire. Elle n'est que forme vide. Et le mot vient boucher un silence mortel. Bâillon des rêves, couvercle insignifiant d'un sens inaccessible. Impudeur. Dénudement dérisoire. Négligeable. Un acte décomposé qui sent le renfermé, le rance. Qui dit la fin dans son premier élan.

 

 

Car rien n'est dit, ou si peu.

 

 

Car il nous faudra signifier au-delà de nos paroles, dans l'avant du dire, dans l'intention claire, dans le chant inaudible et murmurant, et n'être que cantilène, et n'être que berceuse.

 

 

Je cherche un chant introuvable et me perds dans des mélodies obscures. Je cherche la litanie cristalline de la vague, ce refrain qui ouvre droit sur l'aube et l'horizon. Je cherche la trajectoire du verbe, celle qui perce l'ombre, celle qui dénoue les sinuosités du temps, je cherche le mouvement sans détour, sans recoin, sans repli. Je cherche et me perds infiniment. Et mon balancier oscille sur l'abîme de mes mers introuvables.

 

Alors je cherche à rebours des marées sur un océan désert, comme un radeau empêché, désorienté au large de mes souvenirs. Navigation hasardeuse dans les reflets éblouissants des amours inanimées.

 

 

Franck.

 

 

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23 novembre 2008

Rupture......

Le passé se cambre, comme pour soutenir le cintre de la mémoire. Voûte tendue des souvenirs, léchée par l'ombre tremblante de la lumière du jour, qui filtre au travers des vitraux du désir, flammèches de lueurs, qui donnent encore quelques frissons aux pierres humides, aux dalles froides, au chemin de croix déjà parcouru.

 

Il y a des lieux de nous-mêmes dont on ne revient pas. On les arpente la vie durant comme un aveugle, se cognant et trébuchant aux mêmes endroits, n'évitant rien des obstacles mille fois connus. Jusqu'à user nos guenilles. Jusqu'à l'épuisement du moindre désir. Il y a des lieux de nous-mêmes, clôts comme une île perdue. Une île usée par les mêmes vents, rongée par les mêmes embruns, brûlée par les mêmes astres.
Il y a sous la peau nos déserts, et derrière nos yeux les mêmes images, et dans l'oreille la même musique, et dans nos mains cette même attente inutile, cette même distance infranchissable.

 

Le baiser c'est égaré, abîmé, il a sombré dans l'espace trop grand des jours, il est resté collé aux lèvres devenues trop sèches. Et la caresse a refluée, c'est reprise, comme une mer qui se retire, arrachant dans son retrait jusqu'au goût de la chair, pour ne laisser qu'une saveur fade d'os blanchi. Comme si tous les départs étaient des retours. Et toutes les fins d'immondes recommencements.

 

Il y a des lieux de nous-mêmes qui ne nous abandonnent jamais, ils sont la route, et l'unique lumière noire, notre lieu d'éternité. Le sans fin de notre vie. Les ventres se sont séparés, les cuisses se ont refermées, les sexes se sont cachés, les seins se ont durcis pris dans glace du marbre. Les corps sont devenus pierres anguleuses aux arrêtes tranchantes aux paroles acerbes et crues. Les corps ont perdus leurs formes, leur tiédeur, leurs secrets et le mystère de leurs odeurs. A chaque geste un silence en surplomb. A chaque heure un gouffre en partage. Cascade lancinante et dévastée d'ombres sauvages et cruelles. Une à une les portes du langage se sont refermées. Un bruit sec et mat. Mots ravalés, qui viennent s'empiler les uns sur les autres. Murs lourds en parpaing de silence, dressés sur les frontières de l'absence, qui arrivent au grand galop. Déferlante d'indifférence bouillonnante et avide de nouveaux naufrages.

 

Il y a des lieux de l'autre qui nous dépossèdent. Ou pire, qui nous rendent à nous-mêmes. Lieux néants, lieux vides d'espace où la rencontre n'est plus possible.

 

J'ai simplement fermé la porte. Un bruit sec et mat. J’ai simplement étouffé la parole. J'ai simplement voulu aller loin, rejoindre mon île perdue. Celle qui gît, là, au fond de mon ventre. J'ai simplement voulu défaire le tricot des mots, des gestes, défaire le temps lourd et lents, défaire les brumes et les landes qui nous entouraient, défaire la citadelle creuse qu'on osait plus habiter.
Alors j'ai roulé dans ma mémoire. Longtemps.
Cela fait si longtemps que je roule mon errance. Caboteur mélancolique qui cherche sur les rives qu'il frôle le phare. Le phare.
J'ai simplement fermé la porte. Et je ne me suis pas retourné. Il n'y a jamais rien derrière. Il n'y a jamais rien devant. Il n'y a que l'instant, celui-là, celui qui suce le sang. Là, maintenant et qui nous écrase. J'ai les mains vides, même les prières s'en échappent. Et les souvenirs s'écoulent comme du sable au vent.

 

Comme du sable au vent.

Et les espérances s'éteignent comme des nuits sans lune.

Un lait noir et froid.

Poison silencieux de l'errance.

Infiniment longue, infiniment tenace.

 

 

Le passé se cambre, comme pour soutenir le cintre de la mémoire. Voûte tendue des souvenirs, léchée par l'ombre tremblante de la lumière du jour, qui filtre au travers des vitraux du désir, flammèches de lueurs, qui donnent encore quelques frissons aux pierres humides, aux dalles froides, au chemin de croix déjà parcouru. Je suis dans la pénombre voûtée de ma mémoire. La peau nue sur les murs noirs. La peau nue sur l'usure des ans, traversée par une sorte de langueur de crucifié.

 

J'habite une église désertée, sans procession, sans ostension, les saints de marbres gisent absents, le geste vain, le regard vide de compassion. Et sur l'autel, nul calice, nul livre, nulle parole d'évangile, nul cierge, hormis un silence immaculé et austère, imperturbable, et insensible.

 

Il est de ces chapelles abandonnées par les dieux, où seul le temps y pénètre, et les seules prières c'est le vent, et les seuls murmures sont les larmes qui suintent le long des vitraux. Chapelle de nuit et d'orage. Chapelle d'oubli. Ni portes, ni pardon. L'expiation est un long pèlerinage.

 

Mais je sais des arcs-en-ciel qui perceront ces murs.

Je sais des océans dans les plis rugueux de la pierre.

Oui, je sais des saintes.

Des saintes résolues, à la peau de passion, à la chair de cantiques, aux murmures brûlés.
J'entends pousser un arbre au transept de mon silence et couler un long fleuve dans ma nef patiente. Je sais un incendie qui couve.
Et je sais mon sang quand il brûle chacun de mes mots...
Je sais toutes ces choses qui arrivent au galop, au tumulte qu'elles font, aux frissons des étoiles, à l'effarement des cieux.

 

Franck

16 novembre 2008

Trois grains....

L'écriture trace au large de nous-mêmes les frontières d'une liberté inatteignable. Et l'enjeu est là. Insupportable et jubilatoire. Ecrire défini une liberté que nos gestes répudient. Ecrire dépasse notre liberté. C'est ce qui vient après. Ecrire advient après la traversée du désert, dans un pays qui outrepasse nos gestes, nos jours. On a connu l'esclave, l'homme libérable, l'homme libéré, l'homme libre et bien après, le poète. Le poète naît des mirages du désert. Il naît dans le tremblement de la lumière. Et d'un étourdissement. Il naît dans ces océans bleus qui surgissent au-delà des sables. Il naît de cette marche insensée vers ce froissement de l'horizon. Il naît d'une folie.

 

 

 

L'œuvre est dans un temps qui nous est étranger, et d'un regard effaré par l'incessante perte. L'œuvre est toujours dans le deuil d'elle-même, elle se déploie sur un linceul.

Et les lectures sont de grandes funérailles.

L'incessante perte. Ecrire, c'est le mouvement que l'on fait pour se saisir d'un oiseau. Juste le mouvement. L'élan. L'oiseau s'envole à chaque fois. Ce que l'on a voulu saisir s'envole à chaque fois, il reste à peine la trace du geste dans l'air, la trace de ce désir fulgurant, insensé. L'éclat du poème. Et la perte. Toujours la perte. Un élan qui efface un mystère et qui en ouvre un nouveau. Comme si le geste toujours vain, réveillait l'éternité.

Et le poème est toujours en retard du prochain. L'écriture trace au large de nous-mêmes les frontières d'une liberté inatteignable.

 

 

 

Le savant demandait : « Que gagnes-tu à écrire des poèmes ? » Le monde des savants est un monde simple. Il est fait de réponses apparemment justes à des questions apparemment importantes. Contrairement au monde des poètes qui lui est fait de réponses apparemment fausses à des questions apparemment sans importances. Le savant demandait : «Que gagnes-tu à écrire des poèmes ? ». La vraie question aurait put être : « Que perds-tu à écrire des poèmes ? »

Que perds-tu à provoquer les gargouilles de la mémoire ? Que perds-tu dans ce cortège de phrases nuptiales ? Que perds-tu dans cette langue constellée de féroces désinvoltures, dans ces soubresauts démesurés, dans ces infidèles dévotions ? Que perds-tu dans ce vagabondage de crucifié, qui longe les lisières craquelées de l'innommé ? Que perds-tu à cette plainte sourde et furieuse ? Que perds-tu à vider ces grandes charrettes d'envoutements ? Que perds-tu dans ces conjurations fracassées, brisées, fendues, dévorées de boues vaincues. Que perds-tu dans ces fabuleuses absolutions aux corolles béantes et poussiéreuses ? Que perds-tu dans ces danses qui s'abîment dans la soie, à l'ombre des profondeurs béantes ? Que perds-tu... ? Que perds-tu, nom de dieu ?!

Je voudrais tout perdre, et même encore plus. Je voudrais tout perdre, et qu'il ne me reste rien, hormis trois grains de tendresse au creux de ma paume ouverte, et que je tendrai vers Elle. Trois grains de soleil pour éclairer sa part manquante. Trois sourires. Trois baisers. Trois aurores buissonnières. Trois calices de caresses. Trois soupirs. Trois silences. Trois fois rien, en somme.

Franck.

9 novembre 2008

Ignorance.....

Il fallait bien en convenir, le mouvement c’était détaché. Le geste c’était défait. La sidération venait de l’impossibilité à reprendre souffle. Lente dérive inévitable. L’éloignement de soi à soi. La séparation. Séparé de soi, et du geste, et du mouvement.

Nous passons une vie à couver l’œuf de la solitude. Nous ne le voyons pas. Il est là au creux de chacun de nos jours. Gestation sans naissance. Eventration.

Ecrire désigne notre solitude, lui donne un nom. Quel est le nom de ma solitude ? Consentement ? Peut-être.

Et nous n’avons que notre mémoire, et la voix qui la dit ne nous appartient déjà plus.

Je flotte sur mon passé, comme un bouchon de liège désespéré. Un passé sans ancrage. L’incessant mouvement des jours, qui sombrent chaque jour un peu plus. Et je flotte, bousculé par l’écume.

Il fallait bien en convenir, le geste c’était défait.

Quelque chose en soi, se refuse à soi. Un rejet, une répudiation. Une nuit qui monte. Noire, toujours plus noire. Une disgrâce.

Un chagrin pèse, mais on ne le connaît pas. Jamais.

On est inconsolable, mais on ne sait pas de quoi. Jamais.

Alors un jour on écrit. Pour parfaire cette ignorance.

Franck.

2 novembre 2008

Nous n'aimons pas les prières....

C'est vrai nous n'aimons pas les prières. Et pourtant nous prions. Et cela réveille la colère des dieux. Parce que celui qui écrit prie. A genoux dans sa voix, joignant les mains de la parole. A genoux dans sa voix et dans l'ombre glacée du monde. Ecrire c'est une prière qui n'a pas d'adresse, pas de lieux où arriver. La perte est son horizon, la défaite sa résurrection.

Nous n'aimons pas les prières et pourtant nous prions. Blottis dans le manque, passant d'un silence à l'autre, d'une absence à l'autre. Et c'est le chant inaudible du temps qui agonise dans la lumière. Nos prières d'écriture ne vont pas aux dieux. Elles vont comme l'eau. De débordement en débordement. Elles vont comme l'eau qui s'offre aux créatures. Du lait aux vivants. Le lait du vivant.

Elles vont comme l'eau, d'effacement en effacement. Inventant l'abondance de cette faillite perpétuelle. La voix de nos pri_reprières est une voix égarée, qui ne sait pas son chemin, et qui s'éparpille dans les couloirs des jours, et qui prolonge l'attente d'une attente toujours neuve.

Nous n'aimons pas les prières et pourtant nous prions puisque c'est la forme dévastée de l'amour, sa face bouleversée qui attend un baiser. Une miséricorde.

 

 

 

Nous nous blessons souvent sur les bords tranchants du poème, à ravauder les déchirures du ciel, à tenter de réconcilier les deux infinis, mais qu'importe. Puisque nos prières d'écriture servent de festins de lumière aux étoiles. Et puisque chaque jour la mer invente de grands à-plats blancs d'écume, les grands à-plats blancs des pages nouvelles.

 

 

 

Alors qu'importe si mes prières païennes épuisent mon sang, je passe d'une ombre à l'autre, et d'un silence à l'autre, comme un soleil à l'aplomb du désir, oscillant d'un mouvement lent et majestueux, entre l'extase et la désespérance, entre ton visage et les miroirs en deuil.

Qu'importe mon amour, je suis à genoux dans ma voix et dans la crypte de ta passion. Je suis semailles dans le creux de ta chair, illuminé par ton seul regard. Simplement brûlé par l'attente. Simplement bénit par ton souffle.

Récompensé et maudit. Radieux et misérable. Ecartelé entre ma pesanteur et ta grâce.

Franck.

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