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J'irai marcher par-delà les nuages
27 décembre 2013

La lenteur....(fugue)

Il nous faudra  s'assoir pour retrouver la lenteur des temps. Il nous faudra respirer, puiser au plus profond de l'intérieur du corps. Comme vers un continent neuf, qui sortirait des eaux brumeuses. La lenteur appelle l'immobile.
Car seul l'immobile nous rendra la mesure de nos actes, tracera les contours de leur gravité. On ne sait les choses importantes que dans ce mouvement de ralentissement. On ne connaît les choses essentielles que dans l'immobilisation. La stase.

Le sens ne se révèle que dans l'atrophie du geste, dans l'engourdissement de sa course. Dans l'agonie lente de l'impulsion. Alors il nous faudra s'assoir, pour mourir un peu plus fort. Un peu plus sûrement. Un peu plus loin. Avec la lumière qui se dégage de la disparition des fièvres, des grouillements, des effervescences. On ne connaît le voyage qu'aux escales, on ne sait dire le désert qu'à l'ombre des oasis.

On s'assoit. On flotte. Lenteur épaisse des heures qui s'écoulent en raclant la blancheur des os. Curetage patient de nos insomnies, de nos attentes, de nos désolements. Et le vertige. Et la peur qui s'insinue. Temps étrange et singulier de la lenteur, comme si brusquement il devenait important de prendre avec précaution la vie, et la mort qu'elle traîne dans son ombre, et le souffle qui nous parvient. Retenue du mouvement. Comme l'on va pieds nus sur les rochers tranchants. Parcimonie pour échapper à l'écrasement. Et défroisser le temps qui reste, à cause du temps perdu. Défroisser les souvenirs à cause des oublis. Lisser avec obstination la page écrite de trop de mots, de trop d'espoir, de trop désirs inassouvis, de trop de manques. Et chaque instant un crépuscule.

Il y a dans la lenteur du temps cette chose impalpable qui va vers la transparence. Vers l'éclat. L'étincellement. Le reste improbable de l'usure. Il y a dans la lenteur un accroissement d'amour. Comme le murmure accroît la puissance de la parole. Il y a dans le ralentissement une dilatation de l'âme. A cause du poids, et de cette distance qui n'en finit plus pour atteindre l'immobilité fulgurante. L'irradiation.
Il y a dans la lenteur un accroissement d'amour, comme cette caravane qui progresse dans les sables. Et plus le but approche, plus le pas ralenti. Lent cheminement de l'écorce qui rêve en secret au caillou, lent cheminement du caillou qui songe au grain de sable et au vent.

On s'assoit. On laisse monter en soi l'océan vide des regards et des gestes, on élargit les bords du manque, on entre dans son corps, car il est temps d'habiter sa chair et d'ouvrir les bras à l'éternité, on s'assoit et on se laisse traverser par l'éclair d'une solitude grave et brillante, on sombre dans un silence souverain, on s'assoit dans cette dévastation du temps inerte, on longe le gouffre de nos peurs, on parcourt encore une fois nos sentiers d'errances. Le souffle se ralenti. Tout est là, puisque rien ne tremble.

Franck

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