Ton innocence flotte auréolée d’un tremblement limpide...
Je suis une eau errante dessourcée. Je n’en finis pas de couler hors de toute direction, de tout sens. Je cherche un lieu, une âme, un lien, un parfum, une voix. Il n’y a pas d’issue à l’errance, c’est d’ailleurs comme cela que nous la reconnaissons. Pas d’issue.
Il me faut dénuder le temps.
Il gît nu, désormais, dans son impudique pureté, étendu dans le lit de la langue, j’ai posé mon cœur sur l’oreiller des mots, pour recouvrir mon corps d’un linceul transparent…
Temps nu…
Qui plante sa lame tranchante dans le gras de ma vie jusqu’à en toucher l’os…
Temps nu d’attente verticale, crépusculaire, parenthèse frémissante aux paupières du rêve.
Faux blanche dans un champ d’asphodèles…
Temps nu du silence…. Écoulement bourdonnant de substances misérables dans la veine des heures.
Je te parle du plus profond de ce grattement d’os. De ce temps arrêté.
J’essaye de rejoindre avec quelques mots murmurés, et l’écriture la plus virginale, avec ce si pauvre, ta rive farouche couleur d’ambre…
Car tu le sais, le monde s’enchante de la parcimonie, de la rareté, cela l’allège du trop-plein, de l’excès, de la tonitruance. Le monde a aussi besoin de ce " si-peu ". Comme ces prières qui montent des cloîtres : silencieuses, invisibles, cris inaudibles à force de s’opposer au mal, au vide, au néant, à nos insuffisances…tous ces riens, ces " si-peu " jetés dans l’espace !
Le monde s’enchante d’une seule présence invisible, d’un seul geste, d’un seul baiser, du seul mot prononcé dans le dénuement et dans l’absence de toute réponse.
Mais mon amour tu vas l’amble, battement désaccordé au creux d’un monde désarticulé.
Brûlure sacrée des instants rares
Orchidée cueillie sur les lèvres du jour
Je t’ai vu dans mon rêve allongé, les yeux fermés
Ni vivante
Ni morte
Plus que vivante
Plus que morte
Plus vraie qu’un soleil
Sur l’oreiller fragile des mots, j’ai rapproché ma bouche pour souffler sur ta gorge une caresse rouge.
Sous l’arche de ton sommeil vacillant, ma voix devint rumeur innombrable…
Murmure ruisselant…
…. Ton innocence flotte auréolée d’un tremblement limpide.
Ta chevelure noire déverse des champs de comètes frémissantes.
Ta bouche savoureuse s’arrondit dans la chair sanguine des oranges.
Tes yeux consolés chancellent comme des guirlandes de chandelles.
Tes mains délicates en éventails balaient les poussières désargentées de la nuit comme l’aile du papillon effleure le cœur des roses.
Et ton sourire amande a la chaleur des étreintes.
Et ta voix captivante connaît le luxe, l’harmonie des plus grands paradis.
Et ton front réfléchit la lumière et la grâce des lys.
Et ta peau séraphine se perle de rosée.
Et ton corps élégant traverse enfin l’aurore……
Traverse enfin mon rêve.
Franck.