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J'irai marcher par-delà les nuages
16 mai 2021

L’énigme du silence…

 

Dans écrire, il y a une intention. Derrière le premier mouvement, il y a d’autres mouvements. Puis d’autres encore. Jusqu’à l’ultime, qui est une énigme. Dans écrire, il y a un secret. Un impossible secret. Écrire, c’est le traquer. Le cerner. En espérant ne jamais le trouver. Mais le chercher, sans relâche. Une quête à rebours. Les mots sont comme ces taches d’encre pliées sur une page blanche, offertes à l’interprétation. Ils disent à l’envers, ils se lisent à l’envers. Ils errent dans des jeux de miroirs, maraudant ici ou là des significations arrachées à notre quotidien, à l’accumulation de nos gestes, à nos répétitions incessantes, nos entêtements. Nos avidités. Nos impatiences. Mais dans écrire, il y a un secret. Une porte scellée. Le dire serait dire le nombre de notre mort.

Entre les phrases se trouvent de larges flaques, nos lieux de manque, de silence. Parole dévoilée dans l’instant où elle se dérobe, où elle s’absente. Il y a dans le récit un instant de fatigue, un fléchissement, une courbure dans la voix. Cela ressemble aux cendres d’un désir. Ou, cela ne ressemble à rien. Les mots sont là, suspendus, dans l’attente d’une révélation. Ou plutôt dans la crainte d’une révélation. Entre chaque mot, il y a une eau qui passe, lente et mystérieuse. Une eau patiente. Troublante. Le mot d’après est un mot sauvé, malgré nous. Le mot d’après est une ile déserte, une terre isolée qu’il nous faut habiter. Découvrir.

Entre les mots, il y a des visages, des regards, des mains qui se tendent sur la bordure des lettres. Il y a tout un monde. Il y a des soupirs. Le mot d’après est une aube, la consolation d’une nuit blanche.

Celle-là resserrait les mots de son écriture, les rendait denses, enlevait l’espace et la respiration de peur de se faire prendre par un silence. La profusion verbale pour aiguiser son angoisse. Fébrilité d’une langue malade d’elle-même. Écriture pleine de bruit et de fureur. Pleine. Trop pleine pour accoucher du sens. Voix égarée. Nourrie de sa propre ivresse. Enfermée sur elle-même. Sur sa propre contemplation. Écriture étouffée. Bâillonnée.

Cette autre distendait la parole, la coupant à la césure de la chair, de l’os, ouvrait de larges océans entre chaque mot, faisait naitre la nuit et l’aurore. Chaque mot bordait les plaies de la mémoire, offrait leur souffle aux douleurs. Chaque mot dessinait la courbe du temps. Les montagnes. L’hiver, la neige, leurs longues marches solitaires où l’espérance colore la mélancolie. Écriture du murmure. Du crépuscule. Du secret des amants.

Il y a dans écrire de l’amour en jachère. De l’abandon. Jusqu’à l’ultime, qui est une énigme. Juste derrière la vitre des mots, justes derrière le miroir sans tain des mots. L’énigme qui tient tout l’édifice. Pourtant, il y a des amours en jachères. Dans chaque mot, il y a toujours un peu plus que le mot. Ce plus peut nous faire vivre, comme il pourrait nous faire mourir.

Ils ont inventé les chiffres pour compter leurs troupeaux. Ils ont inventé l’écriture pour y mettre les secrets, pour les bruler. Tous les secrets sont des secrets d’amour. Écrire, évite de prononcer les mots magiques.

Écrire scelle le silence autour du désir.
Écrire définit les contours du pacte.

Franck.

Nous avons besoin de la nuit pour nous souvenir...
Etre certain qu'elle revienne sans cesse...

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