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J'irai marcher par-delà les nuages
21 juillet 2013

La chair et le corps.....

L’âme n’est qu’une chair défaite. L’écriture n’est qu’une chair défaite. L’amour est le brasier dans lequel se consume cette défaite. Là se tient toute l’équation. Une équation où tous les termes sont inconnus. Une équation qui ne sera jamais résolue. Le corps est le lieu muet et constant de nos énigmes.
L’écriture épuise le corps.
L’amour épuise le corps.
L’âme est un corps déjà mort et ressuscité.
Nos pensées ne dépassent jamais les contours de notre corps.
Nos rêveries ne sont que de la chair en déroute.

Franck

 

« Car un cheval s’affaiblit beaucoup plus facilement qu’un homme, bien que la différence entre leur ancienne et leur nouvelle condition soit incomparablement moins grande que dans le cas des hommes. On a souvent l’impression – et il en est probablement ainsi – que l’homme a émergé du règne animal, qu’il est devenu un homme, c’est-à-dire une créature capable d’inventer des choses comme nos îles(1) avec toute l’invraisemblance que comporte leur vie, justement parce qu’il était plus endurant sur le plan physique que n’importe quel animal. Ce n’est pas la main qui a fait d’un singe un homme, ce n’est pas un embryon de cerveau et ce n’est pas non plus l’âme : il y a des chiens et des ours qui agissent plus intelligemment et de manière plus morale que l’homme. Et ce n’est pas non plus parce qu’il a maîtrisé la force du feu : tout cela est arrivé bien après que se fut réalisé la condition essentielle de sa transformation. A une époque, dans des conditions semblables pour tous, l’homme s’est révélé le plus solide, le plus endurant sur le plan physique, de tous les animaux….
Un cheval ne tient même pas un mois d’hiver ici, exposé au froid de l’écurie et soumis à un travail pénible et prolongé en plein gel. A moins que ce soit un cheval iakoute. D’ailleurs, on ne les fait pas travailler ceux-là. Il est vrai qu’on ne les nourrit pas non plus. L’hiver, comme les rennes, ils creusent la neige de leurs sabots pour mettre à nu l’herbe desséchée de l’année précédente. Quant à l’homme, il survit. Peut-être vit d’espoir ? Pourtant il n’y a aucun espoir. Si ce n’est pas un imbécile, il ne peut pas vivre d’espoir. Voilà pourquoi il y a tant de suicides. L’instinct de conservation, le fait s’accrocher à la vie et de s’y accrocher justement sur le plan physique – cet instinct auquel est également subordonnée sa conscience -, voilà ce qui le sauve. Il vit de ce qui fait vivre la pierre, le bois, l’oiseau et le chien. Mais il s’accroche à la vie. Et il est plus endurant que tous les animaux. »

Varlam CHALAMOV : Récits de la Kolyma (p129)

(1)Il s’agit des camps, des îles de « l’archipel du Goulag »

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