Juste un peu absente...Juste un peu distante...
Mon Ange. Elle est dans la révolution de l’amour. Dans l’incendie. Le feu dans toutes les pièces de sa maison. Le feu dans son jardin. Partout le feu.
Alors je sauve les dernières images, les dernières roses.
Elle ne ressemblait pas à ses mots. En fait, si, mais à l’envers. Il faut l’imaginer :
Juste un peu absente,
juste un peu distante...
Une eau calme qui se perd dans les reflets du ciel.
Son visage semblait lissé par une étrange sérénité, les paupières baissées comme ces vierges à l’enfant debout dans les ruissellements d’un vitrail.
Visage pali de silence que rien ne pourrait froisser.
Si elle était parfum elle serait mélodie d’un rose léger relevé d’une petite pointe de vert, une senteur du soir à la fin du printemps. Senteur et lueur du soir avec ce je ne sais quoi d’affaibli et de persistant, une note que l’on soutient dans sa dissonance pour parfaire l’harmonie et rendre hommage par avance à la nuit.
Au coin de son sourire s’est logée une douce tristesse.
Visage de neige sur le rouge du cœur.
Un ange est posé sur son épaule. Il la protège des vacarmes, l’aide à effleurer la lumière, lui donne sans doute cette gravité uniquement pour la vêtir de pudeur pastel. Pour ne pas blesser le soleil.
Elle vient de loin, du pays des fées, du pays des pluies, des brumes et d’un temps oublié. Elle est d’ailleurs, toujours au-delà d’un voile comme si elle se tenait derrière une fenêtre qu’un déluge éclabousse, pour nous dissimuler ses larmes.
Je l’imagine penchée sur un travail minutieux, brodant quelque étoile sur des robes crépuscules, peignant quelques tableaux, écrivant, ou simplement assise perdue dans les aurores incertaines d’une interminable prière.
Je l’imagine enveloppée de son seul silence dans l’ombre rougissante de la flamme entêtée d’une bougie solitaire, grand aplat de chair blanche sur les sanglots de la nuit.
Droite. Droite sans être raide elle traverse l’espace pour l’orner, simplement l’orner, une flûte qui jouerait entre les cordes d’une harpe, une brise dans les fougères d’un sous-bois, légère comme le pourpre de l’âme enroulé à la candeur des nuages.
Les miroirs à son passage se taisent, respectueux, ils frissonnent de cette coulée d’ombre claire qui les traverse.
Visage de neige sur le sang lourd de la mémoire.
Parfois on croit la voir flotter pareil aux épis mûrs dans la tremblance de l’été, elle semble alors dans une sorte d’attente lointaine comme si l’instant qui devait suivre devait lui annoncer la promesse d’un amour à cueillir. On ne pourrait l’approcher sans risquer de briser l’infini de son rêve sans risquer de dissiper le charme d’un mystère.
Elle est là, simplement, ange discret qui bât des ailes pour frôler la vie.
Visage de neige, caresse du temps sur l’onde mélancolique des eaux.
Sur ses lèvres la brise a déposé les lettres du mot "amour" qu’elle épèle en un lent murmure.
Juste un peu absente,
juste un peu distante.
Si vous la croisez, vous ne la reconnaîtrez pas, à cause du feu. Elle-même ne se reconnaît plus…. C'est à cela qu'on reconnait les miracles....
Franck (Merci Chris de m'avoir fait découvrir ces si belles peintures de A. Andrew GONZALEZ )