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J'irai marcher par-delà les nuages
21 mai 2005

Une histoire d'amour..... minuscule.....

Au départ on est dans le lointain, on ne se voit pas. Il y a simplement de petites musiques ou quelques fleurs jetées sur le bord de la route. On est aux quatre coins du monde, dans la parole de nos vies séparées, dans l’écume d’une encre chaotique, énigmatique, on est dans la pénitence d’un châtiment de braise. Dans nos maisons c’est les courants d’air, on est dans le vent tourbillonnant de notre âme. Au départ, on ne sait même plus qu’on a une âme, on est seulement dans les ruines d’une église désertée. On est dans un lointain impossible. Parce que nos vies séculaires sont impossibles.

Alors au départ on parle. On est loin et on parle. Parce qu’on pense que c’est la seule chose qui nous reste. Et parler ça fait de la musique, une musique affolée qui vient des chairs, et même de plus loin que les chairs. Tout près de l’os, de l’écorce, de la glaise caverneuse. On vient de l’os, et parler c’est traverser tout le corps, c’est voyager dans le sang, dans les saisons, c’est griffer les nerfs, les vriller, et souvent les mots sont comme des couronnes d’épines. Ils ne sont pas très justes, mais la parole reste toujours vraie. Incroyablement vraie. Une parole farouche et fragile. C’est de la littérature, parce que ça dit toujours les choses vraies avec des mots toujours un peu faux. C’est l’alliance de deux fièvres foudroyantes.

Au départ on est dans une parole trouée, parce qu’on aime les paroles trouées, parce qu’il s’échappe toujours des merveilles de ces trous d’écriture, de ces trous du cœur, de ces trous de vie.

Vous voyez, au départ on est dans le lointain et les mots sont les millions d’étoiles qui nous séparent, et pourtant on est dans le même ciel charitable. Mais au départ on ne sait pas, que le ciel se partage. On continue à jeter des mots au hasard de nos vies. Et puis les mots se touchent, se connaissent, se reconnaissent se mélangent. Bientôt, les mots font l’amour, dans des lits d’orages, dans le temple des étoiles et ils font l’amour dans l’innocence étincelante d’une intimité à peine effleurée, et nous on ferme les yeux, on tourne le dos pour les laisser tranquille pour ne pas déranger leurs noces d’encre.

C’est après que les choses arrivent. Peu à peu. Les mots habitent de plus en plus nos ciels, ils remplissent de plus en plus nos maisons respectives.

Et le temps passe.

Un jour il y a un soleil, puis mille, puis innombrable et on se rend compte qu’il n’y a plus de distance, chaque étoile se sourit dans l’évidence solennelle de leurs seules présences. Il n’y a plus de lointain. On a traversé l’espace et le sang.

Et c’est le trésor d’un chemin tournesol.

Au départ, on est loin l’un de l’autre, on avance dans les pierres de nos vies, dans les cailloux, les ronces, et puis un jour on sent la main de l’autre serrer la sienne. Et c’est la chaleur des mains qui donne cette belle couleur à ce nouveau chemin. On serre une main pleine de mots crucifiés et ressuscités.

Maintenant c’est deux enfants. Ils avaient mille ans et maintenant c’est deux enfants qui marchent main dans la main dans les vestiges tremblants d’une berceuse chuchotée. Elle, elle le taquine un peu ; lui, il lui cueille des fleurs pour les mettre dans sa chevelure. Ils n’osent pas se regarder, simplement des petits coups d’œil à la dérobée. Ils n’osent pas parce qu’ils connaissent l’histoire d’Orphée, eux aussi ils viennent de l’enfer, ils savent que le regard peu tuer, et ils ont envie de vivre. Tant qu’il y a de la chaleur dans leurs mains, ils ont envie de vivre. Dans la nuit ils sont beaux comme une légende, parce que les mots qu’ils disent sont comme des lucioles, et certains soirs on dirait des étoiles filantes.

Lui, il a la tête en l’air, mais elle, la nuit, elle tend l’oreille, et elle jète des pierres sur les loups qui rôdent. C’est lui l’aîné, mais c’est elle, la fille, la petite sœur des mots, qui le rassure. Elle a toujours été comme ça, elle met toujours son doigt là où ça saigne, pour arrêter l’hémorragie du monde, parfois elle en suce les plaies pour en arracher le poison. Elle est comme ça. Elle. L’Ange.

Ils sont sur le chemin et on pourrait croire que leurs pieds ne touchent pas le sol. En fait, c’est vrai, ils volent. Un peu. Mais ça il ne faut le dire.

Lui, il voudrait que le chemin ne finisse jamais. Elle, elle lui dit " avance gros nigaud ! " Il est content quand elle lui dit gros nigaud. Au départ ils étaient dans le lointain, dans l’impossible, et aujourd’hui ils sont dans leur présence. Dans l’évidence, comme dans une révélation. Quand ils sont fatigués, ils se serrent l’un contre l’autre et s’adossent à un talus, et chacun à leur tour ils bercent les rêves de l’autre. La nuit, il aime regarder au fond de ses prunelles : il apprend le vent au souffle de sa respiration, il étanche sa soif avec les gouttes de rosée brodées sur la pulpe de ses lèvres, il entrevois la lumière dans l’or de son corps nu. Il aime protéger son sommeil, il lui dit :" Dors petite guerrière ". Et pour s’endormir, il pose sa tête au creux de son ventre, elle caresse ses cheveux et lui dit : " Dors gros nigaud, dors ".

Si vous êtes attentifs, la nuit, vous pourrez les entendre (ne comptez pas les voir), vous pourrez seulement les entendre si vous êtes assez perdus. Surtout leurs rires, des rires de ruisseaux ou de sources…

Dors, mon Ange….

Franck.

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Commentaires
C
sourire....<br /> merci franck... juste cacahuèteaucoeurlourd... mais ton petit mot m'a ramené un petit sourire.... :)<br /> bisous à toi aussi......<br /> et surtotu continue d'écrire.......... ;-)
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F
Oui, Cacahuète, sans doute. Nos vie sont souvent effondrée, souvent nous nous sentons trahis, meurtris. Souvent les mots se tirent la langue, se font des pieds de nez, oui les mots se déchirent. Oui, ils nous arrivent de vouloir nous coucher, de nous rouler en boule comme une bête blessée, de ne plus rien entendre, de ne plus rien faire... c'est pour cela que j'écris, pour me sauver d'un désespoir infini...<br /> Je t'embrasse Cacahuètetristecematin, je t'envoie un baiser pour que tu reste Cacahuètevivelavie.<br /> Franck
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C
"Vous voyez, au départ on est dans le lointain et les mots sont les millions d’étoiles qui nous séparent, et pourtant on est dans le même ciel charitable. Mais au départ on ne sait pas, que le ciel se partage. On continue à jeter des mots au hasard de nos vies. Et puis les mots se touchent, se connaissent, se reconnaissent se mélangent".<br /> <br /> [...]<br /> <br /> et puis bientot les mots se déchirent.. les mots deviennent des milliers d'éclairs dans un ciel rempli de nuages... et puis bientot les mots manquent de sens, les ciels se séparent.. et puis bientot les mots n'ont plus leur signification, les mots n'ont plus la même douceur.. et puis bientot, les mots s'éteingnent, le ciel est noir........<br /> <br /> pardon d'avoir gaché ta belle histoire... mais c'est ce qu'elle a fait ressortir chez moi........<br /> <br /> bon we franck
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