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J'irai marcher par-delà les nuages
20 décembre 2006

Ouvre les yeux.....

Alors vint le temps où il fallut réinventer l’acte. Redéployer les corps dans leurs chairs. Où il fallut oublier, effacer toute la mémoire et tous les gestes. Réinventer la présence. Réinventer le lieu. Et le souffle. Et la pénombre. Et l’horizon. Et les astres qui le défient. 

 

Se retirer définitivement de soi.

Sans force et sans faiblesse. Revenir à l’unique. A cette chose première. A cette chose dernière. Et se préparer à WhereSeaCaressesShore1toucher les deux extrêmes de la joie et de la douleur. Et à condenser chaque respiration dans le ralentissement du temps, et à condenser le désir en lenteur pure.

Et chaque caresse devra atteindre la profondeur des océans, et chaque soupir portera un peu plus loin la soif. Car c’est le temps, mon amour, des corps nus. C’est le temps des grandes moussons, et de nos pertes souveraines.

 

 

 

Alors il est temps que tu acceptes que mes étreintes te rendent ta substance, te rendent à tes premiers tremblements. Et que mes baisers te lavent de tous les baisers déjà donnés, ou pris, ou volés, ou arrachés, ou déterrés.

Je te veux nue comme tu ne l’as jamais été.

Pas ouverte, pas éventrée. Non. Nue. Pudiquement nue, et droite, et fière, et digne, et immensément forte, et immensément nue. Car que valent mes baisers parmi tous ces baisers passés, que vaut mon offrande, à toi à qui fus dérobée.  Que vaut la pureté de mon regard sur ta chair trop souvent convoité. Et que valent des serments pour toi qui fus si profondément trahie.

Comment réinventer la nudité pour toi qui fus si souvent dénudée.

Comment te dire ou te tendre mon désir, à toi qui fus si souvent désirée.

Comment avancer une caresse vers toi, qui fus tant caressée et si mal caressée.

Comment faire du nouveau avec tous ces larmes anciennes, ces plaintes, ces gémissements.

 

 

 

Alors ferme les yeux. Apprends mon silence. Laisse-le glisser sur ta peau. Laisse-le couvrir ta poitrine et s’arrondir sur ton ventre. Laisse-le glisser dans tes chairs. Apprends mon souffle sur ton cou, sur tes cuisses, sur tes reins, laisse-le courir au profond de ta vie, au bord de tes eaux..

 

 

 

Alors ferme les yeux et apprends ma bouche, mes lèvres, souviens toi de chaque temps de la caresse, comme un piano se souvient des notes qui l’on fait sonner. Laisse venir ta peau à mes doigts, vague après vague, plaisir après plaisir, attente après attente. Comme une tentation longtemps refusée. Creuse, frémis, comme ces eaux des grands lacs qui s’irisent, se rident, et se plissent, lorsque les vents du nord les pénètrent.

 

 

 

Ferme les yeux et respire ma clameur et la grâce d’un instant qui ne pourra pas finir. Gonfle ta chair de ma confiance. Devine ce mouvement qui t’enlace et t’espère, entends le froissement de nos murmures qui nous ajustent.

Sois le mouvement même de mon appel.
Sois la réponse à ma main qui t’interroge. Agrandis l’ombre de ton mystère pour le brûler de sa propre révélation.
Sois le corps avant le corps, la chair avant la chair, sois la source miraculeuse, sois l’amour de mon amour. Sois cathédrale et je serais prières. Pèlerin.

Ferme les yeux comme si tout était advenu. Comme si tout était là, enfin, dans cet espace clôt et pourtant sans borne. Comme si tout était là, dans l’espace incendié de mes doigts sur tes seins, de l’espace océan de mon ventre sur ton ventre. Comme si le feu naissait du mélange de nos eaux lustrales. Déploie ton corps, accepte la forme de mon vertige, de ma folie, de mon appel et de mon cri. Fais-moi naître maintenant, puisque j’accepte de mourir maintenant.

Ferme les yeux et guide-moi vers toi. Apprivoise mon geste. Donne-lui l’élan de ta joie. Donne-lui la direction de ton étoile, de ton ciel. Non je ne pleure pas. Non, tu ne pleures pas. Non, ou si peu alors, comme une neige de décembre.
Défais-moi du froid glacé de mon enfance, défais moi des pluies, défais-moi de tous ces jours où je t’ai attendu, de tous ces jours de peur, de mélancolie. Défais-toi de tous ces regards qui t’on percés, de tous ces mots qui t’ont déjà souillés. Défais-toi de ton nom. Défais-toi de tous ces lambeaux de cauchemars.

 

 

 

Ferme les yeux et défais toi, comme moi je suis défait.bm_silentcaresses
Ferme les yeux et accepte que je puisse être ton offrande. Sacre-moi du bout de tes doigts. Accepte que nos corps puissent parler plus que nos mots. Deux corps dans le mouvement simple de leur vie, deux corps avant le dernier saut, avant l’envol, dans leur seule présence dépouillée.
Laisse-moi remonter les grands fleuves de tes jambes.
Laisse-moi rejoindre l’estuaire au plus haut de tes cuisses.
Laisse-moi brasser tes eaux et pousser dans tes chairs d’interminables mascarets.
Laisse-moi être au plus près de l’écume, accepte l’enlianement de nos membres et l’infini pesanteur du sang qui ralenti et l’infini douceur de l’abandon consenti.

Ferme les yeux et sent les astres te tirer par les épaules, laisse la terre remonter dans tes os. Respire ce temps d’avant, laisse-le entrer lentement dans tous tes soupirs, laisse la fièvre agir, accepte que la torpeur éclatante brise nos chaînes.

Mon amour c’est le temps où les chairs se traversent en remontant les sentiers du désir d’un pas sûr et conquérant.

 

 

 

Ouvre les yeux mon amour, c’est l’heure de cueillir la fleur sanglante de nos âmes tremblantes.

Franck.

 

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Commentaires
M
Ouf, je l'ai pris en plein corps ce silence, cet écrit est échafaudé de plaisirs engagés. Les termes ont excité ma chair jusqu'à l'âme ! Pure lenteur, pure ravissement traversé ! Certes, poète, t’es un amoureux habile ! <br /> <br /> Je relis, encore ! Tu es trop bon.<br /> <br /> motsart<br /> <br /> http://lactionpoetique.aceboard.fr/<br />
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S
Je découvre aussi...pâr l'intermédiaire d' Ex Nihilo que je remercie...<br /> (Coumarine toi aussi es là qui découvre ;)<br /> <br /> Mais Franck, c'est vers vous que je me tourne, vers vous que je suis portée là à cet instant, de la même manière que je vous ai lu, littéralement portée par votre écriture. <br /> Il me semble avoir suivi son cours naturel, son flot, et m'être laissée emportée.<br /> Oui ce que vous écrivez est un cadeau.
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A
je donne, je cueille et je fructifie<br /> <br /> dans le silence et la patience<br /> <br /> dans le secret<br /> <br /> tout va son cours<br /> <br /> et mon désir<br /> et mon amour
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A
je me souviens!
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C
Je redécouvre tes mots, Franck...<br /> et quel bonheur, quelle folie aussi, quelle sensualité.<br /> Je m'y suis plongée dedans à corps perdu (retrouvé?)<br /> Bises
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