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J'irai marcher par-delà les nuages
17 décembre 2017

La tentation de Saint Antoine...

J'ai marché en marge de ma vie. De longues années. Sans doute même de longs siècles. Pour m'arrêter un jour au bord de votre visage
Et j'ai voulu m'asseoir
Et ne plus bouger
Jamais
Simplement vous regarder
Toujours

Au creux d'une défaillance de lumière, j'ai vu au fond de vos prunelles les grandes étendues de poussières blanches du royaume de Saba
Aux confins de tous les déserts
Là où les prières deviennent de simples souffles, des chants d'azur éparpillés
Souvenez-vous, en ces temps-là, vous étiez reine
Reine gracieuse à la pâleur singulière
Reine du pays du vent
Vous trôniez au centre d'un temple de sable, d'étincelles d'éternité
Souveraine majestueuse d'une citadelle de lumière et de tourbillonnement
Princesse immaculée miraculée des limbes juste assez boiteuse pour ne point offenser Dieu
Votre présence effleurante flottait légèrement comme un lambeau de rêve
Ni tout à fait ici, ni tout à fait ailleurs
Oui, vous étiez reine vos gestes le dessinaient
Déesse, vos yeux le révélaient
Et votre voix chantait le chuchotis des amants éternels...

En ces temps là, ermite désolé, je vous ai vu venir, vous sortiez de la nuit emmitouflée d'ombres claires, drapée d'un grand voile constellé
En ces temps là mes os grinçaient de peur
Je passais de dune en dune, de jour en jour, de blessure en blessure, conquérant d'un vide toujours à venir dans la seule espérance d'une stridence inattendue
Le cœur vert
Je passais les bras ouverts au grand vent chaud étreignant des mirages si lointains
Entre mes doigts coulaient déjà ces cendres de temps
J'étais une étoile noire tombée dans de trop grands hasards
De sombres hasards
Un baiser m'eut sauvé
Pas même un baiser
Rien
Pas même une enfance
Seulement des restes d'amours effilochés
En ces temps-là, votre silhouette délicate est passée sur mon cœur
À glacé mon sang
Votre parfum disait l'infini de l'espoir.
Alors au fond de l'horizon le soleil tout à coup bascula dans son lointain sépulcre
Souvenez-vous

J'ai vu votre beauté, légère comme un ciel d'été, glisser avec douceur vers le seuil inconsolé de ma retraite obscure, votre lumière bleue avait la transparence envoûtante de ces jeunes mamans penchées sur un sommeil d'enfance, dans vos yeux scintillait cet espace d'éternité qui appelle la joie pure d'une prière lancée au firmament.
Votre présence fut comme un souffle de mésange, un frôlement rayonnant, une pluie étincelante semée sur mon océan de langueur
Une fleur mystérieuse plantée au jardin de mes absences.

Nous sommes entrés sans prononcer un mot dans la chambre nuptiale de la nuit
laissant grand ouvert les cristallines portes de l'infini pour laisser passer la clarté nuageuse des songes et la fourmillante folie des séraphins éthérés.
Et j'ai bu votre bouche fondante comme l'hostie sacrée et me suis enivré d'une sève à la saveur irréprochable
Dans ces heures rougies au feu des extases éruptives, blanchies aux soupirs de vos invitations, ma mort fut percée d'une flèche de lumière argentée.
Sur votre épaule nue, un ange a déposé ses ailes de silence et sur vos seins opalins j'ai pu laisser couler mes larmes quand votre ventre orageux traversait mon âme transfigurée d'éclairs rougeoyants.
Vos entrailles de chairs pourpres brûlaient mes oraisons laborieuses dans une fulgurance invincible, vertigineuse. Je me noyais sous l'arche inespérée de vos émois, balayé par des rafales de joie.

Et j'ai vu mes mains de prières sur votre corps de louanges.

Et j'ai vu votre ventre lieu infini de la mort exacte.
Et j'ai eu soif de vos eaux généreuses, ce rien à l'âme qui bouleverse toutes les certitudes : marée sauvage, sans retour, sans rémission, effroyablement délicieuse
Et j'ai ouvert les mains pour recueillir jusqu'à l'ultime goutte de vos bruissements et je n'ai pu saisir que l'or de vos silences.
Nous avons partagé la nuit et ses gerbes étoilées recouvertes d'un seul manteau de paix jusqu'à ce que l'aube de sable pousse un large soupir incandescent.
Une rose des sables, rouge.
Dans l'athanor creusé par nos corps, là où votre peau s'est irisée de désir vertical a germé une rose des sables, rouge.
Il ne me restait qu'à attendre l'achèvement des temps en recueillant l'écumeuse blancheur des jours indifférents et de regagner à pas lent mon impatience souveraine à nouveau consentie. Érosion lancinante sous l'œil noueux du souvenir
Frontière sablonneuse inviolable de l'exil.

Au départ il n'y a rien
À la fin il n'y a rien
Entre les deux la mer
L'abîme

Oh, mon Dieu je suis là et je cherche à comprendre
Oh, mon Dieu la nuit n'est plus la nuit
Elle était une source.....elle devint l'océan
Elle était une étoile ....elle devint l'univers
Oh, mon âme brûle et je suis si pauvre seigneur
Je n'ai plus d'espérance mon seul désir est de prier sans fin au cœur de la nuit du monde.
La prière s'enroule au feu de nos secrets, seul l'écho de cette nuit du monde la porte, légère, douce, tendre, on croirait la voir s'élever sur les ailes d'un ange... Et jusqu'au royaume des cieux... »

Franck.

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Commentaires
F
« La tentation de Saint Antoine » reste ce texte merveilleux de Flaubert. Il illumine une adolescence...<br /> <br /> « Ah ! bel ermite !mon cœur défaille !<br /> <br /> …..<br /> <br /> « Je ne suis pas une femme, je suis un monde. Mes vêtements n’ont qu’à tomber, et tu découvriras sur ma personne une succession de mystères ! »<br /> <br /> …<br /> <br /> « Tu te repentiras, bel ermite, tu gémiras ! tu t’ennuieras ! mais je m’en moque ! … »<br /> <br /> Plus tard, Malraux ira à la recherche du royaume de Saba éclairé par le texte de Flaubert, il en fera un récit infiniment poétique où l’action et le rêve se mêlent…<br /> <br /> Joyeux Noël Françoise.
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F
j'aime beaucoup le premier paragraphe. rester dans la tentation est douloureux comme toute attente qui ne débouche que sur une autre attente. oser peut être, j'ai ainsi vécu.. Je vous souhaite un joyeux noël.
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