L'eau et la littérature.... (2)(Fin)
........ Après des luttes acharnées l’âme peu arriver aux abords des eaux des Poissons. C’est l’ultime étape. Il nous faut dépasser nos propres limites, pour approfondir notre méditation. L’horizon s’élargit et l’on se sent envahi d’un vertige de brume et le cœur se rempli d’une désespérante joie et l’on prie pour que l’ineffable advienne. La mer est devant nous, immense, infinie, c’est l’image même de la divinité. Avec l’eau des Poissons nous sommes dans la pure communion. L’eau des Poissons c’est l’Océan, et c’est aux rythmes de la vague et des marées que les Poissons s’expriment. C’est une eau parfois douloureuse, parce que c’est eau compatissante. Aux Poissons on souffre du monde, on a mal aux autres. C’est la dernière étape, l’étape du pardon et de la miséricorde. Aux poissons il nous est demandé d’être nu comme au premier jour, il faut s’être départi de tout, avoir rompu toutes nos attaches, être dépossédé de tous les biens, être même dépossédé de soi. Alors le voyage est possible. Il faut écouter Mallarmé (Poissons du mois de Mars) : " La Chair est triste, hélas ! et j’ai lu tous les livres. L’eau de la mer invite aux voyages. Et surtout aux derniers voyages. L’ultime fusion, la dernière union, le dernier souffle. Et c’est donc au rythme lancinant des marées que les Poissons chantent leurs mélopées. On a une bonne idée de ce qu’est l’eau et une marée Poissons, avec le Boléro de Ravel ( Soleil, lune et Mercure en Poissons). Une musique en spirale, à chaque tour une vague de plus, une note de plus, un instrument de plus, ça pourrait durer à l’infini. Vague après vague Ravel monte sa marée jusqu’à l’acmé finale. L’eau des Poissons est une eau qui s’augmente. Il lui faut du temps, parce que la marée est longue à venir et c’est le ciel qu’elle tire. Victor Hugo, Poissons s’il en fut, retrouve souvent le souffle de la vague dans ses poèmes, la mer peu y être inquiétante, profonde : " Où sont-ils les marins sombrés dans les nuits noires ? Les marées de Hugo sont des marées universelles, pleines de douleurs et de craintes, au contraire avec l’eau De Ramakrishna ( avec Uranus, Lune, et l’Ascendant dans le signe des poissons) l’âme peut s’abandonner : " Il était une fois une poupée de sel qui descendit vers la mer dans l’intention d’en mesurer la profondeur. Elle tenait à la main une sonde. Arrivée au bord de l’eau, elle contempla le puissant océan, jusqu’à ce point elle continua à être la poupée de sel, mais elle n’eut point plutôt fait un pas en avant et mis le pied dans l’eau qu’elle devint une avec l’océan et se perdit entièrement. Le sel qui la composait était venu de l’océan et voici qu’il était revenu à l’océan. La poupée de sel ne peut retourner vers nous, pour nous parler de la profondeur de l’océan. " " Un jour, j’étais en proie à une intolérable angoisse, il me semblait qu’on me tordait le cœur comme un linge mouillé, la souffrance me déchirait, à l’idée que je n’aurais pas dans ma vie la bénédiction de la vision divine. Une frénésie terrible me saisit, je pensais si cela doit être ainsi assez de cette vie ! La grande épée pendait dans le sanctuaire de Kali, mon regard tomba sur elle, et j’eus le cerveau traversé d’un éclair : elle, elle m’aidera à mettre fin. Je me précipitais. Je l’empoigne comme un fou et voici : la pièce avec toute ses portes est ses fenêtres, le temple, tout s’évanouit, il me sembla que plus rien n’existait et à la place je perçu un océan d’esprit sans limite, éblouissant, de quelques parts que je tournasse les yeux, aussi loin que je regardais, je voyais arriver d’énormes vagues de cet océan luisant, au dedans de moi roulait un océan de joie ineffable. " J’ai souvent l’impression qu’un créateur, qu’un artiste, s’appuie sur un des quatre éléments pour donner forme à son imagination. Bien sûr, ce que je dis n’est une preuve de rien. Certainement les contres exemples existent. Qu’importe. L’important c’est d’être saisi par quelque chose. La sensation d’une révélation. Pour finir et faire plaisir à une lectrice Taureau, je fais un crocher par un signe de Terre. Le taureau, se pose toujours la question de la forme, de la consistance. Ils sont sensuels, tactiles, même légers ils sont dans l’épaisseur de la matière, ils tirent, ils portent, ils soutiennent, ils aiment les joies simples et naturelles. Giono est un magnifique représentant de l’écriture Taureau ( Avec L’ascendant, la Lune et Vénus dans le signe ). Il termine Regain de la façon suivante " C’est une joie dont il veut mâcher toute l’odeur et saliver longtemps le jus comme un mouton qui mange la saladelle du soir sur les collines. Il va, comme ça, jusqu’au moment où le beau silence s’est épaissit en lui et autour de lui comme un pré. Tout le signe du Taureau est là. Mieux raconté que dans n’importe quel discours astrologique. Les choses sont parfois moins évidentes. Par exemple avec St Exupéry, (Cancer) un signe d’Eau donc. Or il fut aviateur. Bizarre. C’est dans ses écrits qu’il retrouve son élément naturel : l’eau. A la fin de Vol de Nuit, l’avion est perdu dans l’orage, c’est l’instant ultime. C’est à ce moment précis que St Ex fait appel aux images aquatiques, l’avion devient un bateau, l’orage est une mer déchaînée. St Ex à écrit les déserts aussi, les lieux sans eaux, ou plutôt, les endroits où l’eau avait de l’importance. Chez lui un désert abrite toujours un puits. Et marcher dans les sables c’est marcher vers une eau pure. Une eau salvatrice. C’est la source qui fait le désert et non l’inverse. L’homme est un vaste désert dont il faut découvrir la source. Et le désert est beau de la source qui s’y cache. …………. Seigneur je ne suis rien, sinon cette eau aimante…. Franck
Fuir ! là-bas fuir ! Je sens que des oiseaux sont ivres
D’être parmi l’écume inconnue et les cieux !
Rien, ni les vieux jardins reflétés par les yeux
Ne retiendra ce cœur qui dans la mers trempe
O nuit ! Ni la clarté déserte de ma lampe
Sur le vide papier que la blancheur défend
Et ni la jeune femme allaitant son enfant.
Je partirais ! Steamer balançant ta mâture,
Lève l’ancre pour une exotique nature !
Un ennui, désolé pars les crues espoirs,
Croit encore à l’adieu suprême des mouchoirs !
Et, peut-être, les mâts, invitant les orages,
Sont-ils de ceux qu’un vent penche sur les naufrage
Perdus, sans mâts, sans mâts, ni fertiles îlots.
Mais, ô mon cœur, entends le chant des matelots. "
O flots, que vous avez de lugubres histoires !
Flots profonds, redoutés des mères à genoux !
Vous vous les racontez en montant les marées,
Et c’est ce qui vous fait ces voix désespérées
Que vous avez le soir quand vous venez vers nous ! "
Il en est ainsi de dieu.
Et pour finir avec Ramakrishna et l’eau des poissons.
A chaque fois qu’il le retrouve son art se purifie, il est au centre de lui-même.
Il est devant ses champs. Il s’est arrêté devant eux. Il se baisse. Il prend une poignée de cette terre grasse, pleine d’air et qui porte la graine. C’est une terre de beaucoup de bonne volonté.
Il en tâte, entre ces doigts, toute la bonne volonté.
(…)
Il est debout devant ses champs. Il a ses grands pantalons de velours brun, à côtes ; il semble vêtu avec un morceau de ses labours. Les bras le long du corps, il ne bouge pas. Il à gagné ; c’est fini.
Il est solidement enfoncé dans la terre comme une colonne. "
Cette eau oubliée, simple et désolée, qui attend en silence les lèvres assoiffées qui la feront chanter.