The Needle and The Damage Done
Celui qui viendra sera comme le bruit des nuées de corbeaux s'envolant dans le soleil juste avant l'heure du coucher du soleil, au dessus de chez moi. La première fois j'ai été inquiète. Celui qui viendra devra se rendre compte de l'absurdité de la chair. Les préliminaires exquis, comme ils prétendent. Alors que celle qu'elle a été, elle ne peut que faire, que refaire, qu'en parler, et en reparler, surtout face à des choses qui lui disent : non. On ne veut pas entendre ça. Celle qu'elle a été n'avait pas beaucoup de temps pour découvrir les caresses, déjà les conversations. Car entre deux amoureux, ça commence par une conversation. Peu importe le sujet. On s'en fout du sujet : Damien on s'en branle du sujet. Arrête avec ton sujet. Arrête. Ils parlent. Ils se plaisent. Des fois, ça dégoûte quelqu'un, mais mon cerveau comme disait Hervé était mis en mode automatique. Comme lorsque nous allons nettoyer un petit vieux qui a fait dans ses couches. Comme j'en parlais hier. Celui qui vient devra nettoyer les couches de notre lit. Hum, et devra aussi réapprendre à nettoyer les couches de son propre lit. Du mien, du sien, du nôtre. Elle a été baignée dedans, pas le temps pour les embrassades, pour les envolées lyriques et stupides de la belle langue : tu sors ta queue et tu la mets dans ma bouche. C'est ça le métier, le plus vieux métier du monde comme vous prétendez. Pour le légitimer. Pour vous dédouaner : comme il est très vieux, on ne peut pas l'arrêter. Ce métier. Quel métier vous m'avez fait, quel métier vous m'avez donné, quel métier auquel j'ai pu dire oui. Et surtout celles qui l'ont traversé, ce métier, on ne leur donne même pas une chance d'en parler comme elles veulent : comme si elles étaient respsonsables finalement des décisions politiques qui ont plongé vos siècles dans l'ignorance et les guerres (je suis teneuse d'un Goulag et d'un Baraquement intellectuels). Comme si la souffrance ne poussait personne et n'offrait pas de cadeaux. Je crois qu'elle est un cadeau sublime et irrecevable. Celui qui viendra se trouvera devant des champs, dans lesquels les blés auront été brûlés par le soleil. Le soleil. De printemps. Et celui qui viendra devra se retourner en arrière, pour regarder, car même s'il ne faut pas, au risque de se transformer en sel ou en sable fin, on s'en fout Damien avec la structure, va structurer chez toi, dégage, il faudra prendre avec celle qui est ce risque majeur. Regarder en arrière car je sais trop bien vers quoi on tend à aller. Ceux qui chantent le Gospel regardent vers la Divinité. Et Celle qui était, Franck, celle qui était, celle que j'étais oublie ce que les autres disent sur le péché qu'elle a commis. Et ce péché reviendra inlassablement. Sous-tendu. Il s'est tu. Il ne parle plus. C'est fini mais il est là. Le monstre. Le monstre pour Aileen Wuornos c'était une grande roue, normalement les enfants adorent les Grandes Roues. Mais pour elle c'était un monstre, comme pour son entourage, elle, c'était un monstre. Alors qu'elle rêvait un peu trop d'Hollywood enfant. Et bien Celle qui était c'était pareil qu'Aileen. Qui est morte, assassinée. Comme elle a assassiné des hommes. Le soleil de l'été n'a rien dit à ce sujet-là. Car les envolées lyriques sont magnifiques pour qui a envie de gonfler son plumage. Alors qu'en fait : le mec il vous embrasse dans le cou, c'est un délice complet ou alors un ratage absolu, l'homme se figure qu'il bande pour vous mais en fait ses bourses sont pleines du trop plein d'amour et d'excès de compréhension de cet amour qui le hante depuis des mois, donc il a envie de vous, il met vos pointes de seins entre vos dents, il mordille un peu peut-être inconscient, de revoir dans ces instants-là, quelque chose comme le salut de ses dents au sein d'une mère qu'il ne suce plus depuis des années, sans quoi la société aurait faussement déclarée : anormal ! Pendant le procès. Celle qui a été (car on ne peut plus être) a vu des procès, des procès en forme de métaphores, avec des carafes et des cruches, bien sûr tous les jours elle entend dans la bouche des gens et dans leurs écrits informes, sans saveurs et sans odeurs des procès, des petites violences et surtout leurs flatteries sans le sens, sans le temps retrouvé. Celui qui a pêché lui pêchera une première pierre, précieuse, rouge, verte, orange, quelque chose de plus beau que le métal. De plus noble que le cuivre. Car celle qui viendra ne supporterait pas de voir son Prince porter une couronne de métal ou de cuivre, ni même de le voir se tronquer lui-même dans une stupéfiante conversation avant de passer à table avec son miroir. Je crois que le monde est assez obscène comme ça, inutile d'en rajouter. Car tous les hommes n'aiment pas être sucés. C'est délicat comme question, comme sujet. Donc ils entraient et elle n'était pas très habituée à des envolées lyriques. Il entrait et se déshabillait. Des fois elle avait l'impression de les voir comme s'ils étaient...des monstres. Elle parle au sens littéral du terme. Elle avait des craintes mais l'époque était une époque de fin de siècle, et l'époque était confuse. Elle tendrait aujourd'hui à laisser la place à la Bourgeoisie la plus crasse. La confusion. Soyez prudents. Partout, tout le temps, dans l'écrit, partout, surtout dans l'écrit. L'abattoir sent très mauvais, son activité reprend. Celui qui vient fera de son mieux au final. Finalement. Qu'il soit lui-même, comme eux sont eux-mêmes, c'est très important. De ne pas se trahir. De ne pas trahir sa famille, son clan, son ghetto, son goulag, son baraquement, car le travail rend libre. Cela donne envie de sourire, face au passé, de ressortir une phrase comme celle-là, mise sur les portails, les grandes portes. Le travail rend libre. L'argent. Celui qui vient avait-il besoin d'argent ? Que se passait-il vraiment ? Et S. lui avait dit : socialement, il est versatile. Ils changent d'avis. Il met une langue dans le nombril. Il laisse une petite traînée de salive, sur la peau. Elle a un ange tatoué au dessous de son nombril. Et comme musique dans la chambre c'était du Prodigy. C'était bien mais insupportable. Et il avait sniffé entre ses seins, c'était dans le contrat. De la poudre blanche, pour les enfants c'était de la drogue (de la farine). De la farine des blés brûlés par un soleil d'été. Qui s'est disputé avec le printemps un jour. Les vingt printemps d'une jeune fille en femme devenir. Devenir une femme, travailler le travail rend libre, en tout cas l'indépendance oui. Le travail rend indépendant. Le travail rend libre. C'est pareil Arbeit Macht Frei Achtung. Ich worte...J'ai complètement perdu mon Allemand. Celle qui était n'aimait pas de toute façon les teutons, qui respiraient la drogue entre ses seins, dans le creux du nombril, comme mettre la langue, et ensuite embrasser doucement et tendrement, sans obscénité, son sexe. Avant de le mordiller méchamment, jusqu'au sang, car bien sûr, il ne faut pas se leurrer, c'était doux au début, la société est comme ça au début, après bien sûr, elle a été mordue, après elle mord. Jusqu'au sang, elle a été voir son gynécologue qui était surpris de voir une femme si LIBRE (?) pendant les ébats des amants : elle se faisait mordre là ? Des traces et des coupures bien sûr. De la farine de blé, d'un été brûlé. Arbeit Macht Frei. Le monde est assez obscène comme ça, inutile d'en rajouter.
ANGELINE